Le statut politique et international d’une langue



Au 16e siècle, une nouvelle conception de l’État se fit jour sous le règne de monarques puissants tels que Henri VIII, François I, Charles Quint ou encore Philippe II. Dans le façonnement de ce nouveau concept de l’État, la langue et la religion étaient appelées à jouer un rôle de tout premier ordre. Le slogan "un royaume, une langue, une religion" en reflète bien l’idée centrale.

Vu l’enjeu public et politique, il est clair que la décision de savoir quelle langue sera reconnue comme langue nationale et officielle dépend avant tout des autorités politiques, assistées ou non d’experts en linguistique. La définition linguistique d’une langue est une chose, la définition sociologique et politique en est généralement une autre. La situation du serbo-croate est révélatrice à cet égard. Bien que l’on parle cette langue tant en Serbie qu’en Croatie, l’alphabet usité est différent : en Serbie l’on se sert du cyrillique, en Croatie de l’alphabet latin. D’un point de vue linguistique il s’agit d’une seule langue, mais politiquement parlant, l’on en compte deux.

Un pays peut avoir intérêt à ne reconnaître qu’une seule langue officielle. Cela a été le fondement de la politique linguistique française, déjà du temps des colonies. D’autres pays que la France ont préféré officialiser plusieurs langues : ainsi, la Grande-Bretagne reconnaît l’anglais et le gallois, l’Espagne l’espagnol, le catalan, la galicien et le basque, la Belgique le français, le néerlandais et l’allemand, la Suisse le français, l’allemand, l’italien et le rhéto-roman. Il arrive même qu’un pays accorde le statut de langue officielle à un parler que les pays étrangers considèrent comme étant un dialecte. Dans le contexte européen, c’est le cas du luxembourgeois – langue parlée au Luxembourg – que certains linguistes définissent comme étant un dialecte de l’allemand. Néanmoins, contrairement aux dialectes allemands, le luxembourgeois possède une riche tradition littéraire. Qui plus est, ce parler est largement utilisé dans les médias tels les journaux, la radio et la télévision. Par conséquent, on ne peut pas assimiler son statut à celui des autres dialectes de l’allemand. Quoi qu’il en soit, promouvoir cette langue au rang de troisième langue officielle du Luxembourg – l’inscrivant ainsi parmi les langues officielles de l’Union Européenne – reste une décision politique.

En Malaisie, on utilise plusieurs variétés dialectales dérivées du malais bazaar pour communiquer dans la vie de tous les jours, mais le premier rang est réservé à la langue officielle qu’est le malais standard. En Indonésie, bien avant l’indépendance, les politiciens ont écarté l’idée d’adopter comme langue officielle une des langues nationales. Au lieu de favoriser le javanais, qui est utilisé par plus de 70 millions de personnes, ils optèrent pour une variété standard du malais, adaptée à l’Indonésie. Actuellement, elle est connue sous le nom d’indonésien bahasa ou malais indonésien.

Le statut de langue officielle n’est en aucun cas synonyme de prééminence typologique ou statistique. Or, comme l’octroi de ce statut en implique l’emploi systématique dans la fonction publique, il favorise à la longue l’instauration de règles et l’enrichissement lexical dans les domaines relevant de l’usage institutionnalisé tels l’administration, l’éducation, l’armée, la justice, etc. Dans de nombreux pays où des minorités jouissent d’une certaine autonomie, il existe des lois linguistiques. Celles-ci déterminent de façon précise quelle langue doit être utilisée en quelle occasion. Pareille spécification reflète souvent l’existence d’une gradation. Pensons notamment à la situation du gallois à côté de l’anglais au pays de Galles. Quand il existe plusieurs langues officielles, on assiste généralement à une sorte de répartition des rôles : au Luxembourg, le français reste la langue administrative (écrite), l’allemand la langue des médias, et le luxembourgeois s’est vu élever de langue véhiculaire ordinaire à langue parlée officielle.

L’importance d’une langue ne dépend pas seulement de son statut officiel, mais également du nombre de locuteurs. Pour déterminer quelles langues sont actuellement les plus utilisées dans le monde, il existe plusieurs critères. Si l’on prend comme critère uniquement le nombre d’utilisateurs d’une même langue, les langues asiatiques arrivent en tête de classement, comme le montre le tableau 2 :

Tableau 10.2 Les langues les plus parlées au monde
(en millions de locuteurs, natifs et autres), d’après Grimes 1996

le chinois mandarin 885 le portugais 175
l’anglais 450 le russe 160
l’espagnol 366 l’arabe 139
le hindi/ urdu 233 le japonais 126
le malais indonésien 193 le français 122
le bengali / assam 181 l’allemand 118

En revanche, si, en plus du nombre d’utilisateurs, on considère d’autres critères comme par exemple le nombre de pays où la langue

Tableau 10.3 Les langues les plus "internationales" du monde

Langue locuteurs natifs pays où elle est officielle continents où elle est parlée

PNB en millions de US $ dans les pays clés

anglais 300 47 5 1,069 Royaume-Uni
français 68 30 3 1,355 France
arabe 139 21 2 38 RAU
espagnol 266 20 3 525 Espagne
portugais 175 7 3 92 Portugal
allemand 118 5 1 2,075 Allemagne
malais 193 4 1 167 Indonésie

en question jouit du statut de langue officielle, le nombre de continents où cette langue est utilisée, ou encore la puissance économique des utilisateurs, on obtient un tout autre résultat, comme l’indique le tableau 3.

L’anglais arrive loin en tête tant par le nombre de locuteurs natifs que par le nombre de pays où il a le statut de langue officielle et par sa répartition sur l’ensemble des continents. Rien d’étonnant, dès lors, à ce que l’anglais soit devenu la langue "mondiale" par excellence.

Aussi importants que soient ces faits sociologiques, ils sont exclusivement basés sur des critères de comparaison externe. Dans la section suivante, nous abordons des critères d’ordre structurel interne.

 


ОСНОВНЫЕ ЛИНГВИСТИЧЕСКИЕ ТЕРМИНЫ, ИСПОЛЬЗУЕМЫЕ В РАБОТЕ

Данные лингвистические термины подробно разъяснены в тексте работы. Некоторые из них используются во многих разделах курса, чтобы при необходимости вспомнить их содержание, и составлен данный указатель, в котором указаны страницы, на которых они получают свое объяснение.

Агглютинация , 92, 93.

Аккомодация, 37, 38.

Актуализация , 18, 19.

Аналитизм , 92, 93.

Асимметрия , 58, 87, 123.

Ассимиляция, 38,39.

Виды грамматик , 83.

Вокализм, 29.

Гипероним, 115, 122.

Гипоним, 122.


Дата добавления: 2019-09-13; просмотров: 159; Мы поможем в написании вашей работы!

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